Giétro 1818 | Une course contre la montre


Une course contre la montre

Christine Payot (Bureau Clio Sàrl, Martigny)

Des travaux à peine concevables ont été entrepris pour éviter la catastrophe : percer, à plus de 1800 mètres d’altitude, une galerie d’environ 200 mètres de long dans un barrage naturel formé pour l’essentiel de glace et de neige. Et il faut faire vite, le temps presse. Cette folle entreprise est le fruit de l’infatigable Ignace Venetz, jeune ingénieur cantonal. Il brave tous les dangers et parvient à convaincre tous les sceptiques du bien-fondé de sa galerie. Comment a-t-il procédé ? Parallèlement, face à cette situation de crise, une commission est mise sur pied. La gestion de la crise et les travaux de Venetz ont entraîné des coûts extraordinaires. Qui les a financés ?

UNE SITUATION INATTENDUE ?

La formation du lac n’est pas totalement une surprise. Le glacier du Giétro avait attiré l’attention des savants par sa situation très particulière. Son front – qui surplombe de plusieurs centaines de mètres le défilé de Mauvoisin – s’effondre périodiquement au fond du vallon1. Dès 1805, Jean de Charpentier, directeur des mines de sel de Bex, visitant les lieux, observe au pied du Giétro de gros blocs de glace éparpillés. Il décrit l’étrange spectacle auquel il assiste : « Les masses détachées du glacier se précipitant en abondance se [brisent] en éclats par la hauteur de leur chute et [sont] jetées en tout sens. »2 En 1811, Venetz fait le même constat3. Selon Hans Conrad Escher de la Linth, qui écrit en août 1818, cela fait déjà cinq ans que des glaçons tombent depuis le bord du glacier, s’accumulent dans le lit de la Dranse, et ont commencé à former un nouveau glacier… qui ferme ainsi absolument le fond de la vallée4. De là à soupçonner qu’une retenue d’eau est susceptible de se former dans cette partie de la vallée, il n’y a qu’un pas.

D’autant que, de son côté, la population locale a vécu, dans une moindre mesure, une situation analogue en 1817. En effet, elle a assisté le 22 mai de cette année-là5 à une petite débâcle dont elle connaît la cause. Si celle-ci fut sans grandes conséquences pour Bagnes6, elle causa quelques dommages dans la plaine de Martigny7. La situation était similaire à celle du printemps 1818, mais l’eau du lac avait finalement pu s’écouler par une issue située sous la voûte formée par l’amas de glace8. La population et les autorités locales sont donc sur le qui-vive en ce printemps 1818, d’autant que la Dranse, qui n’est plus qu’un mince filet d’eau, ne présage rien de bon.

Dans ces circonstances et au vu de témoignages divergents, la découverte de la formation du lac ne peut être attribuée à une personne en particulier. Il pourrait s’agir de paysans qui seraient montés à leurs mayens9. L’époque de sa découverte reste aussi peu précise ; en avril, disent les chroniques. Ce qui est certain, c’est que les députés des communes de Martigny, Sembrancher et Bagnes ont envoyé un homme examiner la zone à six reprises entre le 3 et le 11 mai10.

LES TRAVAUX DE VENETZ

En ce 10 mai 1818, lorsque, envoyé par le gouvernement, l’ingénieur Ignace Venetz (1788-1859) arrive au fond de la vallée, là où les éboulements du glacier du Giétro ont barré le vallon et qu’un lac s’est formé, il a déjà eu un compte rendu détaillé de la situation : on lui a fourni des données sur la masse d’eau qui constitue le lac et sur les dimensions de la « barrière de glace  ». Cependant, ce qu’il observe est bien pire. Après un examen rapide, mais réfléchi, et de savants calculs, il ne voit pas d’autres solutions que de faire percer une galerie, afin de vidanger le lac. Elle sera creusée à la fois du côté du lac et du côté de Bagnes, afin d’accélérer le chantier, car le temps presse.

Le creusement d’un puits est également amorcé au sommet de la barre de glace, précisément en son centre, perpendiculairement à la galerie. Une fois le puits achevé, le but est de pouvoir percer la galerie de quatre côtés à la fois11. À peine cet ouvrage entamé, Venetz doit pourtant l'abandonner, car une énorme pierre est tombée dans le puits12. L’ingénieur lui trouvera bientôt une autre utilité. La galerie du côté du lac est susceptible d’être obstruée par les débris du glacier qui descendent quotidiennement, si bien que les ouvriers courent le risque d’y rester piégés. Ils exigent donc une galerie de secours. Venetz fait creuser cette galerie à partir du puits qu’il avait dû abandonner13.

Parallèlement aux difficultés qu’il rencontre sur le chantier, l’ingénieur subit des pressions de la part de la Commission du Giétro14 et du président du dizain de Martigny, Philippe Morand, pour creuser une tranchée. Il s’agirait d’une solution de secours au cas où la galerie ne serait pas percée à temps. Pour ce faire, la commission est prête à envoyer autant d’ouvriers que nécessaire15. Quant à Morand, il envisage de faire monter 300 à 400 hommes !16 Venetz s’y refuse et argumente que la tranchée risque d’être comblée à tout moment par une avalanche ou un bloc de glace. En un instant, leurs efforts seraient réduits à néant. En outre, dès le moment où la tranchée serait un peu profonde, les ouvriers ne pourraient plus extraire la neige à la pelle. Il faudrait dès lors utiliser un traîneau qui empêcherait tous les ouvriers de travailler sauf ceux qui se trouvent au centre de la tranchée. Une galerie est bien plus avantageuse, car il ne faut sortir que la glace et la neige nécessaires à l’écoulement de l’eau17.

Les travaux vont durer trente-quatre jours et s’opérer en deux phases. Il faudra vingt-cinq jours pour percer la galerie et neuf jours pour l’abaisser au niveau du lac. En effet, il faut encore creuser le sol de la galerie de manière à accélérer la pénétration de l’eau. Le matin du 5 juin, ces travaux sont mis à l’enchère à la maison de l’Abbaye, chez le président Gard18. C’est Jean Baptiste Pressas qui décroche le mandat. Cet homme, originaire de Novare, est marié à une Bagnarde et domicilié au Fregnoley.

LA  COMMISSION DU GLACIER DU GIÉTRO :
UNE COMMISSION POLYVALENTE

Comment gérer au mieux cette situation à risque, assurer la bonne marche des travaux et garantir leur financement ? Les deux commissaires du gouvernement, François Delacoste et François Indermatten, proposent au grand bailli de créer une commission permanente à qui il déférerait tous les pouvoirs. Cette commission administrerait l’exécution des travaux et dicterait les mesures à prendre19. L’idée est approuvée et la commission est mise sur pied dès le 14 mai20. Elle siège au Châble, aux frais des communes et dizains menacés21. Malgré une existence officielle, on ne lui attribue pas de nom particulier, si bien qu’elle apparaît dans les documents sous différentes appellations : « la Commission de Bagnes  »22, « la Commission des eaux de Bagnes  »23, « la Commission centrale établie à Bagnes  »24, « la Commission de l’exploitation du glacier du Giétroz  »25, etc. Elle se décrit elle-même comme « La Commission du gouvernement établie ici [Bagnes] pour la direction des travaux qui s’exécutent sur le glacier du Giétroz, afin de diminuer les dangers qui menacent les communes placées au bord de la Dranse et du Rhône  »26.

Ses fonctions sont multiples et toute l’organisation de cette situation de crise repose sur ses épaules. Mais sa tâche principale concerne la gestion du budget. Elle encaisse l’argent de ses débiteurs – ce qui ne va pas sans problèmes comme nous le verrons plus bas – et gère les dépenses, en particulier celles liées au chantier. C’est elle qui administre les comptes des travaux que l’ingénieur dirige. En accord avec Venetz, elle fixe les prix qui seront négociés avec les entrepreneurs et les ouvriers. La commission s’occupe en outre de toute la logistique du chantier. Elle s’active pour trouver les fournitures indispensables à l’ingénieur et à la bonne marche de ses travaux. Si les lanternes ou le papier réclamés par Venetz sont faciles à se procurer auprès des marchands de Bagnes, la tâche se complique quand il s’agit de trouver des fournitures plus spécifiques. Les ouvriers réclament des bottes pour protéger leurs pieds et leurs jambes de l’eau qui stagne sur le sol des galeries. Il leur en faut douze paires. Mais malgré sa bonne volonté, la commission ne parviendra pas à trouver autant de bottes à la bonne taille en un laps de temps aussi court.

La diffusion de l’information incombe également à la commission. Elle reçoit et transmet les nouvelles qui concernent les travaux de Venetz. Elle sert de relais entre celui-ci et le gouvernement valaisan. Par le biais de circulaires, la commission communique aux communes en danger les ordres du gouvernement, en particulier ceux relatifs aux mesures de prévention, comme la mise en place d’alarmes. Enfin, plusieurs de ses membres se rendent périodiquement sur le glacier pour juger par eux-mêmes de l’évolution de la situation. De lourdes responsabilités pèsent sur eux.

La composition de la Commission du glacier du Giétro n’est ni fixe ni définitive. Elle est censée être formée de personnes issues des communes exposées au danger27. Dans un premier temps, ses membres sont au nombre de trois : le président de la commune de Bagnes, François Joseph Frédéric Gard, le châtelain de Martigny, Joseph Samuel Gross, et le secrétaire communal de Sembrancher, Daniel Ribordy. Gross est enrôlé presque malgré lui dans la commission. Morand l’a envoyé à Bagnes avec une somme d’argent pour financer les travaux, mais le président Gard le retient et ne veut pas le laisser redescendre28. Le conseiller communal Ducrey le relaiera durant un temps29 ; puis, un certain Gay30 le remplacera définitivement.

La commission cherche désespérément à intégrer un, voire deux représentants des dizains de Saint-Maurice et Monthey31. Mais ceux-ci tardent à satisfaire cette demande. Pour parvenir à ses fins, elle sollicite l’appui de Philippe Morand, qui lui-même s’adresse directement à François Delacoste, commissaire du gouvernement domicilié à Monthey, mais en vain. Alors, Morand dénonce au Conseil d’État l’attitude peu solidaire de ces deux dizains inférieurs et réclame de celui-ci qu’il fasse pression32. Entre-temps, Saint-Maurice et Monthey ont envoyé à Bagnes deux émissaires, Pignat fils, de Vouvry, et Barman, aubergiste à Saint-Maurice. Ceux-ci affirment face à la commission que leurs dizains sont suffisamment fortifiés et ne craignent aucun danger. Ils « auraient mieux fait de rester chez eux  », s’agacent les membres de la commission33. À la fin mai, deux Messieurs des dizains inférieurs, de Preux et Cornut, montent au Châble pour représenter provisoirement leur dizain respectif34. François Indermatten les retient à Bagnes jusqu’à l’arrivée du député qui doit finalement être choisi dans le dizain de Saint-Maurice35. En définitive, ce sera de Preux. La commission souhaite également intégrer un représentant du gouvernement, mais sans succès. En juin, elle compte quatre membres : Gay, Ribordy, Gard et de Preux36.

LE FINANCEMENT DES TRAVAUX

Les travaux sont ordonnés par le gouvernement. Celui-ci établit comme principe que toutes les communes menacées par la débâcle contribuent aux dépenses37. L’imminence du danger fait que les opérations sur le terrain sont immédiatement engagées. Les communes de Bagnes, Sembrancher et Martigny ont rapidement suppléé aux premiers besoins. Philippe Morand envoie le châtelain Gross à la Commission du glacier du Giétro « porteur d’une somme suffisante pour faire face aux premiers besoins  »38. Ainsi, le 21 mai, Bagnes a déjà versé 320 francs, Sembrancher, 160, Martigny, 320. La commission peut donc compter sur 800 francs, mais cette somme est nettement insuffisante. Et le reste de l’argent tarde à arriver.

Pourtant la question du financement des travaux vient très vite sur le tapis. Dès le 15 mai, la commission écrit au président du dizain de Martigny pour l’informer qu’elle va demander au Conseil d’État que les dizains de Saint-Maurice et Monthey – qui sont également menacés par la débâcle – envoient immédiatement des fonds pour payer les travaux. La commission menace : « Pourquoi placerions-nous des signaux à nos dépens pour les prévenir ? N’est-il pas juste qu’ils contribuent aux frais des travaux que le gouvernement a jugés nécessaires ? »39 Les dizains de Saint-Maurice et Monthey tardent à payer leur dû. Le 19 mai, ils n’ont toujours pas répondu à la demande de fonds. Le vice-président du dizain de Monthey, resté seul aux commandes, puisque son président est encore à la diète, argumente ainsi :

« Je présume au reste que cela [leur retard de paiement] ne peut mettre aucun obstacle à la continuation des travaux pour lesquels le dizain de Martigny a déjà fait une avance assez considérable et qui ne peut être encore épuisé. D’ailleurs, le dizain d’Entremont, qui est le plus intéressé, ne restera pas le dernier à faire des sacrifices pour accélérer les travaux communs et au surplus la disette des deux dernières années a tellement épuisé notre dizain de numéraire par les prix exorbitants auxquels on était contraint d’acheter les grains, qu’il ne lui sera guère possible de faire des sacrifices un peu plus conséquents.  »40

Au début du mois de juin, sur l’invitation du gouvernement, ces dizains versent enfin un acompte de 30 louis (sur les 50 qu’ils doivent)41.

La commission réclame également de l’argent au gouvernement et menace d’abandonner les travaux si elle ne reçoit rien :

« Nous implorons votre assistance, Excellence, et c’est aux pères de la chère patrie que nous prenons la liberté d’adresser nos humbles prières, afin qu’ils daignent nous envoyer des fonds dans un cas aussi urgent (…). Nous avons le regret de vous annoncer que si le gouvernement ne vient pas à notre secours par quelque prompt moyen dans les 24 heures, nous sommes obligés de nous retirer et d’abandonner les travaux qui se soutiennent déjà depuis plusieurs jours sur notre seul crédit.  »42

Mais les plus récalcitrants à verser leur part (10 louis) restent les Bovernions. Malgré les demandes réitérées et toujours plus pressantes de la commission, ils refusent obstinément de contribuer aux frais des travaux. Leur état de pauvreté ne leur permettrait pas d’avancer une telle somme. La Commission des eaux de Bagnes réfute cet argument, car « pour une somme aussi modique, il est impossible que votre curé ne la trouve tout de suite par la voie de l’emprunt  »43. La commission menace d’envoyer des militaires chez le président44. Le 11 juin, sous l’injonction du gouvernement, Bovernier finira par payer45.

LE COÛT DES TRAVAUX

Le 16 octobre, la Commission du glacier du Giétro se réunit à Martigny pour rendre ses comptes. Les travaux à la barrière de glace constituent naturellement le plus important poste de dépenses. Ils ont coûté 3247 francs, ce qui représente 74% des coûts totaux enregistrés. Viennent ensuite les frais de la commission elle-même. Ces frais n’étant pas détaillés, on ne connaît pas leur nature exacte, mais ils doivent inclure des frais de fournitures, de déplacement, de logement et des frais de bouche. Ils s’élèvent à 617 francs. Les fournitures nécessaires au chantier n’ont coûté que 395 francs.

Les frais de communication ont, quant à eux, coûté 42 francs. De nombreuses informations et ordres devaient être transmis par lettres ou simples billets entre l’ingénieur en poste à Bonatchiesse et la Commission centrale au Châble, ainsi qu’entre la commission et les communes et dizains concernés par la crise. Deux personnes au moins sont spécialement chargées de transporter ces missives.

Les six courses accomplies par Jean Georges Troillet sur le glacier entre le 3 et le 11 mai pour donner son avis sur l’augmentation du lac sont également incluses dans les dépenses de la commission. Troillet a reçu 10 francs. Enfin, en signe de remerciement pour son engagement sans faille, la commission gratifie Venetz d’une somme de 100 francs.

Le total des dépenses s’élève à 4411 francs et quelques batz. Or, les recettes se montent à 3514 francs et 7 batz. La commission enregistre donc un déficit de 896 francs et 9 batz46. Elle réclame le résidu au grand bailli, car cette somme doit encore être soldée « à des malheureux indigènes victimes de cette inondation  »47.

DES INSTRUMENTS DE PREMIÈRE NÉCESSITÉ

Venetz manque des instruments les plus indispensables. Jean de Charpentier, directeur des mines de sel de Bex, lui fait parvenir gracieusement une boussole, ainsi qu’une sonde afin qu’il puisse pratiquer une ouverture au puits qu’il veut faire creuser 48.

DES HOMMES VICTIMES DES CIRCONSTANCES

Le Conseil de Martigny envoie au glacier le châtelain Gross, afin qu’il négocie les prix avec les ouvriers. Mais Gross se retrouve malgré lui « coincé  » à Bagnes :

« Monsieur Gross est singulièrement étonné que vous le laissiez ici avec un mulet à la charge de la commune, s’il eût prévu que vous ne fussiez venu au jour promis, il aurait renvoyé son mulet et demander des habillements. Il serait déjà descendu si Monsieur le président Gard l’avait voulu relâcher. Il attend son remplaçant. Veuillez lui faire réponse à cet égard par le retour de l’express.  »49

DAVID CONTRE GOLIATH :
DES HOMMES À L’ASSAUT D’UNE « BARRIÈRE DE GLACE  »

Pour accomplir les travaux imaginés par Ignace Venetz, il faut de la main-d’œuvre. Qui sont ces hommes qui ont travaillé à la barre de glace ? La question n’est pas facile à résoudre, car rares sont les documents qui les mentionnent nommément. Si Venetz évoque très souvent les ouvriers lorsqu’il discute de leur salaire ou encore lorsqu’il détaille les dangers qu’ils encourent, il ne cite qu’exceptionnellement leurs noms.

Pourtant, dès le 11 mai 1818, ces hommes sont à pied d’œuvre, et en nombre, puisque entre le 11 et le 12 mai ce ne sont pas moins de 124 ouvriers qui sont payés, soit une moyenne de 62 par jour. Puis, durant les deux jours qui suivent, ils sont une trentaine, parmi lesquels 16 Sembranchards et 16 Bagnards. C’est alors que le temps se gâte et que l’ingénieur ne parvient à retenir que cinq d’entre eux, tous de Bagnes. Il s’agit probablement des ouvriers que Venetz cite dans une lettre datée du 15 mai à 20 heures : Barthélemy Michellod, de Verbier, Pierre Nicollier, Pierre Maurice Michaud, de Médières, et Étienne Joseph May, du Cotterg.

Quelques jours plus tard, des maîtres maçons « italiens  » sont envoyés depuis la plaine. Cependant, Venetz, qui ne parvient pas à s’entendre avec eux sur les prix, les renvoie, d’autant que leurs ouvriers sont trop jeunes et sous-équipés. Des Salvanains auraient également proposé leurs services, mais à des prix jugés prohibitifs par l’ingénieur. Il ne restera finalement sur le chantier que des ouvriers de Bagnes et un « Allemand  », le fameux Jacob Aberlin. Quant à Jean Baptiste Pressas, originaire de Novare et domicilié au Fregnoley, il n’interviendra à la « barre de glace  » qu’au mois de juin pour abaisser la galerie.

En octobre 1818, lorsque la Commission centrale du glacier du Giétro rend ses comptes, elle produit un document unique et précieux qui lève un peu le voile sur l’identité de certains des ouvriers. Il s’agit d’un registre de comptes qui détaille les recettes et les dépenses de cette commission. Parmi les dépenses figurent les travaux à la « barre de glace  », les livraisons de marchandises et le montant de certaines prestations comme le port de lettre ou la surveillance du niveau du lac avant le début des travaux. Les patronymes des individus qui ont accompli ces différentes tâches sont parfois précisés. Les noms des hommes qui ont percé les galeries et creusé le puits sont très certainement ceux des entrepreneurs sous les ordres desquels ont travaillé les ouvriers.

DES REGRETS

Dans une lettre au grand bailli, datée du 19 mai, le président du dizain de Martigny Philippe Morand déplore que les deux commissaires du gouvernement, François Delacoste et François Indermatten, ne soient pas restés plus longtemps pour aider à la coordination des travaux. Il se fustige lui-même de ne pas avoir quitté plus tôt Sion où se déroule la diète :

« Je n’ai d’ailleurs rien à ajouter au regret que j’ai manifesté dans ma dernière de ce que Messieurs les commissaires du gouvernement se sont séparés trop tôt. Le résultat en est probablement irréparable. J’aurais moi-même à me reprocher de n’avoir quitté Sion avec Monsieur le grand châtelain Indermatten parce que j’aurais compris à temps utile qu’il fallait parler d’argent. »50


1. Jean-Michel Gard, « L'impact de la débâcle de 1818 », dans 16 juin 1818, Débâcle du Giétro, Collection du Musée de Bagnes n°1, Le Châble, 1988, p. 59-60. 

2. AEV, 3 DTP 29.8.2/15. Lien vers l'inventaire. Voir le document

3. Ignace Mariétan, « La vie et l'oeuvre de l'ingénieur Ignace Venetz 1788-1859 », dans Bulletin de la Murithienne, Fasc. 76 (1959), p. 6. 

4. Hans Conrad Escher de la Linth, «Notice sur le val de Bagnes en Bas-Vallais, et la catastrophe qui en a devasté le fond, en juin 1818 », dans La Bibliothèque universelle, vol. 3, n°4, 1818, Genève, p. 4. 

5. AEV, 3 DTP 28.1.13. Lien vers l'inventaire. Voir le document

6. AEV, De Rivaz famille, Rz 153, p. 96 et 134r. Voir le document

7. Hans Conrad Escher de la Linth, « Notice sur le val de Bagne en Bas-Vallais, et la catastrophe qui en a dévasté le fond, en juin 1818 », dans La Bibliothèque universelle, vol. 3, n°4, 1818, Genève, p. 4. 

8. AC Bagnes, P 1063/6, p. 6. Voir le document

9. Philippe-Sirice Bridel, Course à l’éboulement du glacier de Gétroz et au lac de Mauvoisin, au fond de la vallée de Bagnes, 16 mai 1818, Vevey, [1818], p. 8. 

10. AC Bagnes, P 1063/7. Voir le document

11. AEV, 3 DTP 28.1.7. Lien vers l'inventaire. Voir le document

12. AC Bagnes, P 796/6. Voir le document

13. AEV, 3 DTP 28.1.20. Lien vers l'inventaire. Voir le document

14. AC Bagnes, P 1063/6, p. 3. Voir le document

15. AC Bagnes, P 1063/6, p. 3. Voir le document

16. AC Bagnes, P 1063/1. Voir le document

17. AC Bagnes, P 796/8. Voir le document

18. AC Bagnes, P 1063/6, p. 25. Voir le document

19. AEV, 3 DTP 28.1.7. Lien vers l'inventaire. Voir le document

20. AC Bagnes, P 1063/7, p. 1. Voir le document

21. AC Bagnes, P 1063/6, p. 10. Voir le document

22. AC Bagnes, P 1063/6, p. 1. Voir le document

23. AC Bagnes, P 796/10. Voir le document

24. AC Bagnes, P 1063/7, p. 1. Voir le document

25. AC Bagnes, P 796/6. Voir le document

26. AC Bagnes, P 1063/6, p. 22. Voir le document

27. AEV, 3 DTP 28.1.13. Lien vers l'inventaire. Voir le document ; AEV, 3 DTP 28.1.15. Lien vers l'inventaire. Voir le document

28. AC Bagnes, P 1063/6, p. 6. Voir le document

29. AEV, 3 DTP 28.1.24. Lien vers l'inventaire. Voir le document

30. Il peut s’agir soit de Joseph Bruno Gay, vice-châtelain du Conseil de Martigny, soit d’Eugène Gay, un conseiller de la commune de Martigny. 

31. AC Bagnes, P 1063/2. Voir le document

32. AEV, 3 DTP 28.1.10. Lien vers l'inventaire. Voir le document

33. AC Bagnes, P 1063/6, p. 18. Voir le document

34. AEV, 3 DTP 28.1.27. Lien vers l'inventaire. Voir le document

35. AEV, 3 DTP 28.2.1. Lien vers l'inventaire. Voir le document

36. AEV, 3 DTP 28.2.8. Lien vers l'inventaire. Voir le document

37. AEV, 3 DTP 28.2.3. Lien vers l'inventaire. Voir le document

38. AC Bagnes, P 1063/1. Voir le document

39. AEV, 3 DTP 28.1.9. Lien vers l'inventaire. Voir le document

40. AC Bagnes, P 1063/4. Voir le document

41. AEV, 3 DTP 28.2.1. Lien vers l'inventaire. Voir le document ; AEV, 3 DTP 28.2.3. Lien vers l'inventaire. Voir le document

42. AEV, 3 DTP 28.1.17. Lien vers l'inventaire. Voir le document

43. AC Bagnes, P 1063/6, p. 22. Voir le document

44. AC Bagnes, P 1063/6, p. 24. Voir le document

45. AEV, 3 DTP 28.2.7. Lien vers l'inventaire. Voir le document

46. AC Bagnes, P 1063/7, p. 7. Voir le document

47. AEV, 3 DTP 28.7.1/8. Lien vers l'inventaire. Voir le document

48. AC Bagnes P796/9. Voir le document

49. AC Bagnes, P 1063/6, p. 6. Voir le document

50. AEV, 3 DTP 28.1.14. Lien vers l'inventaire. Voir le document